Qu’appelle-t-on le wahhabisme et le salafisme ?
Le wahhabisme est une doctrine religieuse dont le nom vient de Muhammad ibn Abd al-Wahhab (1703-1792), un prédicateur originaire de la péninsule Arabique. Il remet à l’honneur et renouvelle les pensées de l’école d’Ahmad ibn Hanbal (780-855), l’une des quatre grandes écoles juridiques sunnites.
Le hanbalisme est une manière très rigoureuse d’interpréter l’islam. Parmi les savants célèbres se réclamant de cette école se trouve Ibn Taymiyya (1263-1328), connu pour avoir valorisé le mouvement médiéval fanatique des kharijites qui, entre autres choses, légitimait explicitement le meurtre d’autres musulmans sous des motifs religieux. Ibn Taymiyya est aussi célèbre pour la fatwa qu’il promulgua (1305) contre les chiites en général, et les minoritaires chiites en particulier, appelant au massacre de masse sous motif d’apostasie. Ses écrits sont devenus une référence pour le mouvement wahhabite.
Propagandiste d’action plus que réel penseur, Muhammad ibn Abd al-Wahhab voulait revenir aux bases de l’islam, telles qu’il les concevait du moins. Il prônait donc un monothéisme très strict, interdisant la vénération du Prophète, l’amour pour ses successeurs, le culte des saints, etc., autant d’hérésies relevant pour lui d’un complot satanique. Il guerroya contre tous ceux qu’il considérait comme des polythéistes : en 1746, il lança ainsi le jihad contre les chiites d’Irak, où massacres et pillages furent commis. Pour les peines légales, il favorisait la lapidation pour adultère. Son intransigeance doctrinale lui valut d’être brocardé par quelques savants religieux, dont son frère, Soulayman, qui rédigea une réfutation du wahhabisme naissant. Il fut même accusé d’apostasie par certains de ses contemporains.
Muhammad ibn Abd al-Wahhab insistait sur l’obéissance sans faille due au souverain. En effet, l’alliance entre sa famille, le clan al-Shaykh (et plus généralement tout le clergé wahhabite), et le clan princier des Saoud, constitue jusqu’à nos jours le pilier du pouvoir actuel en Arabie. Néanmoins, l’alignement politique de la famille régnante sur les intérêts nord-américains pose souvent de graves problèmes de cohérence idéologique. Ibn Baz, grand moufti du royaume de 1993 à son décès en 1999, condamna à mort « toute personne affirmant que le Soleil est immobile sans se repentir, car cela revient à démentir les dires du Prophète ».
« Salafisme » signifie littéralement « retour aux pratiques des pieux ancêtres », à savoir la génération du Prophète et les deux suivantes. Ce mouvement, à la fois religieux et politique, se base sur une interprétation rigoriste du Coran et de la tradition prophétique, et rejette toute « innovation blâmable ». Le salafisme connaît plusieurs tendances : prédication (entre pédagogie et violence symbolique), action militante (violence physique). Bien que différents, wahhabisme (lié organiquement à la famille Saoud) et salafisme (international mais dépendant du financement saoudien) se rejoignent sur de nombreux points.
Stéphane Valter
Le hanbalisme est une manière très rigoureuse d’interpréter l’islam. Parmi les savants célèbres se réclamant de cette école se trouve Ibn Taymiyya (1263-1328), connu pour avoir valorisé le mouvement médiéval fanatique des kharijites qui, entre autres choses, légitimait explicitement le meurtre d’autres musulmans sous des motifs religieux. Ibn Taymiyya est aussi célèbre pour la fatwa qu’il promulgua (1305) contre les chiites en général, et les minoritaires chiites en particulier, appelant au massacre de masse sous motif d’apostasie. Ses écrits sont devenus une référence pour le mouvement wahhabite.
Propagandiste d’action plus que réel penseur, Muhammad ibn Abd al-Wahhab voulait revenir aux bases de l’islam, telles qu’il les concevait du moins. Il prônait donc un monothéisme très strict, interdisant la vénération du Prophète, l’amour pour ses successeurs, le culte des saints, etc., autant d’hérésies relevant pour lui d’un complot satanique. Il guerroya contre tous ceux qu’il considérait comme des polythéistes : en 1746, il lança ainsi le jihad contre les chiites d’Irak, où massacres et pillages furent commis. Pour les peines légales, il favorisait la lapidation pour adultère. Son intransigeance doctrinale lui valut d’être brocardé par quelques savants religieux, dont son frère, Soulayman, qui rédigea une réfutation du wahhabisme naissant. Il fut même accusé d’apostasie par certains de ses contemporains.
Muhammad ibn Abd al-Wahhab insistait sur l’obéissance sans faille due au souverain. En effet, l’alliance entre sa famille, le clan al-Shaykh (et plus généralement tout le clergé wahhabite), et le clan princier des Saoud, constitue jusqu’à nos jours le pilier du pouvoir actuel en Arabie. Néanmoins, l’alignement politique de la famille régnante sur les intérêts nord-américains pose souvent de graves problèmes de cohérence idéologique. Ibn Baz, grand moufti du royaume de 1993 à son décès en 1999, condamna à mort « toute personne affirmant que le Soleil est immobile sans se repentir, car cela revient à démentir les dires du Prophète ».
« Salafisme » signifie littéralement « retour aux pratiques des pieux ancêtres », à savoir la génération du Prophète et les deux suivantes. Ce mouvement, à la fois religieux et politique, se base sur une interprétation rigoriste du Coran et de la tradition prophétique, et rejette toute « innovation blâmable ». Le salafisme connaît plusieurs tendances : prédication (entre pédagogie et violence symbolique), action militante (violence physique). Bien que différents, wahhabisme (lié organiquement à la famille Saoud) et salafisme (international mais dépendant du financement saoudien) se rejoignent sur de nombreux points.
Stéphane Valter
Pour aller plus loin :
- Qu’est-ce que le salafisme ?, Rougier Bernard, Paris : Puf, 2008
- L’énigme saoudienne, Pascal Ménoret, Paris : La Découverte, 2003
- Une histoire du wahhabisme, comment l’islam sectaire est devenu l’islam, Hamadi Redissi, Paris : Seuil, 2016
- Wahhabism and Salafism – shared foundation, different methods, Mohammed Gharabieh, qantara.de, 2014, Voir le site
- Le wahhabisme disséqué : entretien avec Daoud Riffi, Jihâd Gillon, Querelles d’Orient, 2016, Voir le site
- Les nouveaux intellectuels religieux saoudiens : le Wahhabisme en question , Stéphane Lacroix, Revue des monde musulmans et de la Méditerranée, juillet 2008, 123, p. 141-159, Voir le site
- Daesh est-il l’enfant du wahhabisme ?, Rendez-vous de l’histoire du monde arabe, 2016 , Voir le site
- Qui sont les Salafistes ? , IMA, 2013, Voir le site
- Salafistes, François Margolin, Lemine Ould M. Salem, 2015 (film qui a fait polémique pour l’utilisation brute de ses documents, interdit aux moins de 18 ans)